04.03.2008

Camembert de Normandie, nécro fromagère annoncée

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Difficile de ne pas songer à un duel à la David et Goliath. Dans le rôle de David : les producteurs de camembert d’appellation d’origine contrôlée de Normandie. Dans celui de Goliath : Isigny-Sainte-Mère et Lactalis (Lepetit, Lanquetot en grande surface, et d'autres marques dans les crémeries), deux géants retirés, en signe de protestation, de l’appellation d’origine contrôlée depuis avril 2007. La hache de guerre ? La volonté des deux groupes de réviser le contenu de l’AOC qui protège et définit le camembert de Normandie depuis 1986.

Une raison de s’inquiéter…? Euh… Lorsqu’ils ont quitté l’AOC, les deux industriels représentaient près de 90% de la production d’authentique camembert de Normandie. Une pression forte, très forte, donc, sur l’Institut national des appellations d’origine (INAO), qui doit prochainement statuer sur la demande de révision exprimée par Isigny-Sainte-Mère et Lactalis.

Le mouvement qui répond au doux nom de Slowfood France et le vénérable Comité de défense du véritable camembert mènent aujourd'hui une campagne de sensibilisation aux enjeux gustatifs et culturels de ce projet de modification du décret de 1986.
Rendez-vous sur la pétition !

Pour ceux que l’affaire intéresse, petit résumé des dernières évolutions du dossier

99543f101aba738ce448a44cdd9e38d1.jpgJusqu'à présent, l’AOC du camembert de Normandie rend obligatoire l'utilisation de lait cru. Pour des raisons d'hygiène, Isigny-Sainte-Mère et Lactalis réclament une modification du décret de l'AOC (le texte qui énonce les conditions à remplir pour commercialiser un fromage sous cette appellation) : l'usage de lait "microfiltré", "thermisé", ou enrichi ne modifierait pas le goût et écarterait toute menace pathogène...

L'argument sanitaire ne convainc pourtant pas Sylvie Montal, directrice du laboratoire scientifique et technologique du lait et de l'oeuf de Rennes, pour qui les risques demeurent "statistiquement infimes". La scientifique reconnaît par ailleurs "un risque certain d'uniformisation" de la saveur des produits.

La modification du cahier des charges réclamée par les deux industriels est actuellement en cours à l'INAO (Institut national des appellations d'origine).

Le détail des conditions de l'AOC, ici : actu-10.pdf

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03.03.2008

Camembert du cœur et de l'esprit

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"C'est la grande tristesse des Normands". Ce n'est pas moi qui le dis, c'est Francis Rouchard, secrétaire général du Comité de défense du véritable camembert de Normandie : "Il n'y a plus qu'une seule ferme de production traditionnelle dans la région", déplore le militant, qui entend affirmer "le droit des consommateurs à se fournir en produits de qualité".

Moi aussi, ça me déprime un peu, de penser que demain, on aura le choix entre un produit qui n'a pas de goût et un produit qui n'a pas de goût dans les hypermarchés. Je trouve même ça triste, de nourrir notre chair d'aliments tristes, résultant d'une logique économique implacable : quand on produit 90% du camembert, qu'on a en mémoire les risques sanitaires liés à la listéria (germe pathogène qui a touché la production de Lepetit en 1999) ou au germe Escherichia coli (qui a touché le producteur Réaux en 2005) - de simples gastro-entérites, au demeurant, on préfère privilégier le célèbre "risque 0" : "La sécurité est à son maximum", plaide ainsi Claude Granjon, directeur adjoint de la coopérative d'Isigny-Sainte-Mère. "Les risques deviennent extrêmement limités. On les estime à 2 % au maximum. Mais c'est encore trop ".

"Le problème, analyse Francis Rouchard, c'est que le consommateur ignore que par sa fabrication traditionnelle, le fromage passe par un stade de fermentation, c'est-à-dire que - contrairement à son état dans le pis de la vache, le lait ne reste pas stérile." C'est la vie, quoi. Enfin. C'est le fromage, autrement dit.

Face à la volonté des industriels Isigny Sainte-Mère et Lactalis de pasteuriser le lait ou de le traiter, avant de le ré-enrichir de flore native (sans quoi il ne pourrait pas se transformer en fromage!), Francis Rouchard explique le risque de perte de goût : "Les souches de bactéries ne peuvent pas être représentatives de l'ensemble du troupeau, cela donne donc un produit standardisé!".

Mais Francis Rouchard a un espoir : l'exemple du Sallers, du Saint-Nectaire ou encore du Reblochon. "Ces fromages sont issus de vraies productions fermières, ils bénéficient donc d'appellations d'origine contrôlée(AOC) dites fermières", explique-t-il, insistant sur l'urgence de clarifier le vocabulaire des AOC pour le consommateur. LA solution? "Recréer le tissu de production fermière normande". Après quoi il sera possible de mettre en valeur ces produits de qualité de manière "lisible" au sein de la grande distribution. Pourquoi pas sous la forme du concept du "shop in the shop", s'interroge Francis Rouchard...

Qui a dit que les défenseurs du camembert au lait cru étaient réactionnaires? Ils parlent anglais, consultent les données du mouvement états-unien Raw Milk sur Internet. Ils souhaitent juste le bonheur de notre chair... Qui passe par la bonne chère. Pourquoi ne pas relire Rabelais avant de faire nos courses? Je vous le demande...

29.02.2008

"No limits, no fear"

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Une balle de golf en pleine poire pendant un paisible dîner sur une terrasse parisienne? Si ça ne vous est jamais arrivé, sachez que la menace plane...

Ils sont de plus en plus nombreux à y prendre goût, à s'échanger leur coordonnées sur le blog du collectif Le 19ème Trou, leader dans la capitale. "L'urban golf" est devenu leur dada. Leur credo est digne des sports extrêmes. "No limits, no fear".

Dans la vie, ils portent des chemises, travaillent en open space dans les bureaux de la capitale. Jusqu'à ce que l'appel du large se fasse sentir. Le soir, en général. Un SMS par-ci, un post sur Internet par-là, quelques heures suffisent pour qu'ils investissent le "spot" de leur choix. Un peu comme les adeptes du Fight Club dans le film de David Fincher.


Effrayant, non?

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Enfin, ils ont beau se faire peur, à l'occasion ("Quand je suis dehors, c'est l'éclate! Dans la rue, on a la sensation d'être borderline", explique le street golfeur Paul-henri Braendel), le golf des rues reste plutôt safe.

Berlin, 1992. C'est là que tout a commencé, avec les Natural Born Golfersen, créateurs du golf en espace urbain. Entendez : la pratique d'un golf démocratique, à la portée de tous, sur fond d'idéologie punk. En 1997, le street golf débarque sur les toits londoniens. Avant de s'exporter à Paris, vers 2000.

Comme la plupart des tendances urbaines nocturnes, le mouvement s'accompagne d'une riche création graphique : affichage sauvage dans les rues (art urbain, autocollants, etc), videos et produits dérivés .

Certains profitent de ce climat d'expérimentation pour développer des pratiques innovantes en intérieur :


Français de toutes les régions, réjouissez-vous : le street golf étend son réseau sur tout le territoire!

Si vous êtes tenté, ne ratez pas ce diaporama, très fidèle à l'esprit du street golf.

Ni ça :

26.02.2008

Pas d'interdiction de fumer sans feu

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L’histoire ne date pas d’hier. On y est venu en plusieurs temps.
L’objectif nous était présenté de manière simple : "Limiter la consommation de tabac des Français."

Très vite, nous avons réagi.

La France a sa petite réputation de "patrie des libertés" à défendre, que diable ! Bref, c'était l’époque où le chroniqueur Pierre Marcelle choisissait, "par résistance", d’intituler sa chronique "Smoking " (devenue No Smoking), dans Libé.

Depuis, les fumeurs ont mûri. Ils ont su comprendre que la cigarette n’était pas un vrai choix, mais un aveu de faiblesse, face à l’ensemble de la société.
Le discours "Je suis un rebelle parce que je fume alors que maintenant c’est en partie interdit par le gouvernement" est devenu le comble du politiquement correct. Il est donc – dieu merci, progressivement tombé dans la désuétude.

Ce qui ne veut pas dire que les "Gaulois " ont mis leur langue dans leur poche. Ni qu’ils ont perdu tout sens de la solidarité, entre parias.

Et pour rien au monde, cela n’aurait empêché un buraliste comme Joël Laillier de saisir la balle au bond pour pointer l’opportunisme de cette mesure de la part de nos dirigeants.

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Tenancier du bar tabac L’Escale du Dresny, en Loire-Atlantique, Joël Laillier reste dubitatif face aux choix de santé publique du gouvernement :

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Pour mémoire, le buraliste revient sur son choix de résister à l'application du décret entré en vigueur en janvier dernier, dans l'espoir d'obtenir une dérogation pour les tabacs des bourgs ruraux :



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Après une rafale de médiatisation inespérée, Joël Laillier s’est demandé s’il n’avait pas aidé la confédération des débitants de tabac à relancer les négociations avec le gouvernement, sans en récolter de quelconques retombées…



podcast

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Accueilli pour un bref échange à l'Elysée le 7 février par Nicolas Sarkozy, Joël Laillier déplore que ni lui, ni aucun de ses confrères buralistes, n'aient été conviés à la table des négociations.
Pire, il doute de la représentativité du président de la confédération des débitants de tabac, René Le Pape, seul porte-voix des intéressés dans la concertation.


Voici ce qui lui a mis la puce à l'oreille :

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Beaucoup d'investissement pour un retour très limité, en somme. Dans cet épisode, Joël Laillier a tiré un enseignement utile : sans préméditation, la médiatisation ne permet pas à coup sûr d'atteindre la cible visée.

D'ailleurs, après avoir envisagé de prolonger sa résistance sous forme d'association, en reprenant le surnom que lui avaient donné les médias : "Joël le Rebelle"... le buraliste a finalement opté pour "Sauvons nos libertés".
"Qui veut dire beaucoup plus de choses", a-t-il conclu à la lumière de sa brève expérience médiatique.



Ici, un retour sur la couverture télé de l'action de Joël Laillier...